lundi 29 février 2016



L'arbre du pays Toraja, Philippe Claudel,
Stock, 2016

Très touchée par ce roman, comme toujours d'ailleurs avec cet auteur...
Texte profondément émouvant sur la mort, le rapport à son corps, l'amour aussi et l'impermanence de toute chose...
Le roman s'ouvre sur l'évocation de la coutume mortuaire d'un peuple d'Indonésie les Toraja. Ils placent les tout petits enfants qui viennent de mourir dans un arbre gigantesque, qui devient alors sépulture : "Une cavité est sculptée à même le tronc de l'arbre. On y dépose le petit mort emmailloté d'un linceul. On ferme la tombe ligneuse par un entrelacs de branchages et de tissus. Au fil des ans, lentement, la chair des arbres se referme, gardant le corps de l'enfant dans son grand corps à lui, sous son écorce ressoudée. Alors peu à peu commence le voyage qui le fait monter vers les cieux, au rythme patient de la croissance de l'arbre."
Un roman philosophique teinté d'autobiographie, inspiré par la maladie puis la perte de l'éditeur Jean-Marc Roberts, Eugène dans le livre, avec lequel Philippe Claudel entretenait une relation très forte toute à la fois amicale et intellectuelle. Des pages intenses, mélancoliques qui ouvrent sur une réflexion pleine de lucidité sur l'existence humaine...
"Nous autres vivants sommes emplis par les rumeurs de nos fantômes. Notre chair et la matière de notre âme résultent de combinaisons moléculaires et du tissage complexe de mots, d 'images, de sensations, d'instants, d'odeurs, de scènes liés à celles et ceux que notre existence nous a fait côtoyer de façon passagère ou durable. Poursuivre sa vie quand autour de soi s'effacent les figures et les présences revient à définir constamment un ordre que le chaos de la mort bouleverse à chaque phase du jeu. Vivre, en quelque sorte, c'est savoir survivre et recomposer."
Et puis au détour des pages, l'on croise soudain Milan Kundera, auquel Claudel par l'entremise d'Eugène, rend un superbe hommage puis Michel Piccoli, et de nombreuses références littéraires.
J'ai aimé ses descriptions poétiques et méditatives, tissées dans une langue subtile et délicate qui invite sans cesse à l'introspection.
Un livre profond et inoubliable (Stéphanie, Médiathèque de Thann)

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